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L'amour (pour concours)

par Nessie 13 Mars 2014, 19:46 texte court écriture

C’était ça l’amour ? Je l’avais regardé se tourner sur lui même avec cette beauté nonchalante qui quelque part m’avait toujours fait mal en lui. C’était comme s’il dansait et chantait en y ajoutant mon nom, dans un soupir. L’amour ça puait le joint, et lui aussi. J’avais passé un doigt ou plusieurs le long des traits de son visage pour vérifier qu’il était réel. C’était ça l’amour ? Ses yeux étaient fixes et effrayants, doux, repoussants, bien trop clairs pour être normaux. Il s’abreuvait des âmes sûrement, il devait se nourrir de la mienne car je me sentais de plus en plus démunie face à son regard, car je me sentais mourir de plus en plus à chaque seconde qu’il me regardait. Il avait tant de défauts que je voyais clairement tout en me permettant de les oublier. L’amour comme mensonge à soi-même par omission, l’amour comme un oubli, une erreur. C’était ce que nous étions, ce que j’étais pour lui, ce que lui était pour moi. A son sens, nous étions cosmiques, notre rencontre avait une raison d’être, nous allions nous retrouver, à un autre moment, dans un autre temps, une autre vie. La théorie du chaos, voilà ce que c’était, nous avions fait naître ce chaos qu’était l’amour, par la grossière erreur de nous trouver, et maintenant je me trouvais là. Je me trouvais là sur une vieille chaise en plastique. Un réel chaos. Non, la réalité était plus loin, dans le fond, cachée par des têtes que je ne connaissais pas. Tout cela créé par ma faute sûrement, quelque part. Il y avait bien des gens que je connaissais, ils me haïssaient au plus profond, pour des conneries qui étaient soudainement devenues crimes contre l’humanité. L’effet papillon, vous me direz. Je ne crois pas ; c’était sûrement cosmique. Je le croyais lui, pas les autres. Je le croyais lui parce que je ne croyais plus en rien. Un signal, je me levais de ma chaise, jusqu’à une autre chaise. J’étais dans le fond de la salle, comme je l’étais dans son esprit. Je tendais ma main et son ombre vint s’inscrire sur le parquet froid. Je n’écoutais rien de ce qui se disait, je ne comprenais même pas. Je ne voyais que le cercueil de bois froid, le sien, je pensais à quel point il devait être inconfortable. Il n’y avait pas de fleurs, pourtant il aimait les fleurs, une fois il en avait peint, je crois. Autour, ils parlaient d’amour, envers Dieu, ils ne parlaient que de ça, je voulais leur crier que j’étais là, qu’il m’avait aimé moi, non pas leur Dieu, qu’il avait aimé d’autres personnes encore, mais tout le monde s’en fichait, je n’étais que de passage, je l’avais connu si peu, j’étais l’histoire de quelques heures volées. Un sursis offert par la vie, c’était peut-être ça l’amour, un peu de temps volé au compte à rebours. En attendant, il m’avait volée moi aussi, il m’avait dépouillée, mise à nu, c’était injuste, injuste comme sa mort, injuste comme les frêles bras dans lesquels il m’avait serrée pourriraient bientôt jusqu’à l’os. Une pourriture, l’amour, rien qu’une pourriture. C’était tout ce que c’était, je crois bien, pas un mot de plus, ni de moins.

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